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Le roi est nu et le coq sans plumes

“…Le chœur, dissimulé le plus souvent et chantant masqué, dirigé par Roberto Balistreri, s’en sort aussi – et comme souvent- avec tous les honneurs, même si ce n’est pas l’opéra russe où il est le plus sollicité.

Et enfin last but not least, Daniele Rustioni à la tête de l’orchestre de l’Opéra de Lyon montre une fois de plus combien il aime et connaît ce répertoire (il a jadis travaillé en  Russie), il rend un son chatoyant, plein de couleurs ; il rend le lyrisme de certaines pages, non dépourvues d’ironie d’ailleurs, mais aussi le côté faussement épique avec un usage des cuivres tonitruants (les trompettes initiales plus tonitruantes que justes, mais c’est un détail). Cette musique est à l’instar du livret sarcastique et variée : chaque acte a sa couleur particulière, et dans cet ensemble c’est évidemment l’acte II le plus lyrique, au point que le spectateur garde longtemps en tête certaines mélodies. Rustioni par la clarté de sa lecture montre la variété et la richesse de cette musique qui est loin de puiser seulement dans un « folklore » russe ou un faux orientalisme, c’est aussi un concentré d’éléments qui vont de Debussy à Wagner ou Strauss qu’on entend, avec des bouts de phrases musicales, des accents, des citations brèves, l’utilisation de certains instruments, et on est en même temps au seuil de Stravinsky (élève de Rimski-Korsakov). Rustioni très attentif aux rythmes et aux couleurs le fait entendre tout en veillant sans cesse aux équilibres et notamment à ne jamais couvrir les chanteurs, à les soutenir et les accompagner : il rend la performance musicale d’ensemble exceptionnelle.

C’est un très grand spectacle (qui devait être présenté l’automne dernier après Aix), qui marque avec bonheur, et l’entrée de Barrie Kosky dans les metteurs en scènes vus à Lyon et avec nostalgie la fin du mandat de Serge Dorny puisque c’est sa dernière production.”

Guy Cherqui, Wanderer

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